jeudi 11 septembre 2025

“Dans cette période chaotique, la CFDT est un pôle de stabilité”

Temps de lecture 13 min

Extrait de l'hebdo n°3977

Au lendemain de la chute du gouvernement Bayrou et de la nomination d’un nouveau Premier ministre, Marylise Léon fait part de son inquiétude face à une nouvelle période d’instabilité politique. Et rappelle les priorités de la CFDT en cette rentrée sociale chamboulée.

Par Anne-Sophie Balle, et Jérôme Citron — Publié le 10/09/2025 à 14h00

© Simone Perolari

La France est de nouveau sans gouvernement. Comment analyser ce qui vient de se passer ?

Le résultat du vote de l’Assemblée nationale n’a pas été une surprise. La question de confiance posée par François Bayrou ne répondait pas aux enjeux de la période. Selon la CFDT, la question n’est pas de savoir s’il y a un problème de déficit public dans notre pays mais comment peut-on répartir les efforts de la manière la plus juste possible. Malheureusement, la nouvelle instabilité politique n’augure rien de bon pour le monde du travail.

Dans cette période chaotique, la CFDT est un pôle de stabilité. Nous devons poursuivre notre travail de syndicalistes en gardant notre boussole, à savoir l’intérêt des travailleurs. Nous jouons un rôle de vigie, à la fois pour peser sur les choix politiques et budgétaires mais aussi pour continuer à donner des repères aux travailleurs, dont l’exaspération qui prévalait avant l’été s’est transformée en colère. Et cette colère n’est pas près de disparaître.

Pourquoi appeler à la mobilisation le 18 septembre alors qu’il n’y a plus de gouvernement ? Et pourquoi ne pas avoir appelé à la mobilisation du 10 septembre ?

Nous sommes dans notre rôle d’organisation syndicale. Nous nous faisons le relais des aspirations des travailleurs dans un cadre syndical, avec nos mots d’ordre et nos méthodes d’action, ce qui n’est pas le cas de la journée du 10. La date du 18 septembre, elle, a été choisie avec l’ensemble des organisations syndicales autour de revendications communes. Il n’est pas question de « tout mettre à l’arrêt » ou de demander la démission du président de la République.

“Les partis politiques se positionnent aujourd’hui comme des écuries présidentielles sans réellement apporter de réponses aux questions qui se posent à moyen et long terme. A contrario, à la CFDT, nous nous efforçons de penser le temps long.”

Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT

C’est une manière, aussi, de marquer notre indépendance vis-à-vis du politique. C’est d’autant plus important que les partis politiques se positionnent aujourd’hui comme des écuries présidentielles sans réellement apporter de réponses aux questions qui se posent à moyen et long terme. A contrario, à la CFDT, nous nous efforçons de penser le temps long.

La question budgétaire reste néanmoins posée. Comment la CFDT veut-elle peser dans les prochains mois ?

Il est utile de rappeler que la fin du gouvernement Bayrou ne signifie pas la fin du processus budgétaire. Un nouveau gouvernement va se mettre en place, et il y a fort à craindre que certaines idées refassent surface très rapidement – or les pires sont souvent celles qui reviennent le plus vite.

La CFDT n’a pas changé d’opinion. Nous demandons que les choix budgétaires soient débattus. Il faut une véritable concertation. Mais disons-le clairement : il n’y a pas grand-chose à garder des propositions faites par le Premier ministre en juillet dernier. Il faut tout remettre à plat. Selon la CFDT, deux sujets doivent être abordés en priorité : la conditionnalité des aides publiques et la taxation des ménages les plus fortunés, la fameuse taxe Zucman. Reconnaissons que, sur ces deux sujets, le débat public n’est pas à la hauteur, voire à la limite de la caricature.

Enfin, nous serons très vigilants sur le calendrier parlementaire en cette rentrée afin que les accords que nous avons signés soient fidèlement retranscrits dans une loi. Je pense notamment à l’accord relatif à la non-limitation des mandats syndicaux, lequel est très attendu par nos militants. Il est hors de question qu’il passe à la trappe.

Tu as souvent pointé la responsabilité des organisations patronales, ne voulant pas s’engager dans la période (négociation du Pacte de la vie au travail, “conclave retraites”…) Peut-on encore dialoguer avec le patronat ?

Nous sommes à un moment charnière avec les organisations patronales qui, par dogmatisme idéologique, n’ont clairement pas joué le jeu dans le cadre des discussions sur les retraites et n’ont pas voulu prendre leur part de risque. Quand on affirme vouloir peser et être une force de stabilité dans le pays, il faut être capable de dépasser sa popote interne. Aujourd’hui, je ne veux pas entendre le patronat dire que l’instabilité politique est insupportable alors qu’ils n’ont pas pris leurs responsabilités.

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